19/06/2014
Méaudre, c'était il y a 70 ans. Entre Paroles d'étoiles, Paroles d'espoir
Evoquer la Résistance dans le Vercors, cela nous renvoit souvent aux terribles images et témoignages des combats de l'été 1944. Mais la résistance sur le plateau, ce fut également tout un ensemble de démarches, de refus, d'actes de désobéissance envers l'occupant et ses sbires collaborationnistes. Soustraire, en la cachant, une personne vouée à la déportation et à une mort certaine, fut un bel exemple de courage.
La petite Agnès, obligée de fuir Paris en juillet 1942, alors que la capitale était la cible d'une rafle massive de juifs, trouva un temps refuge à Lyon avant de parvenir à Méaudre et d'y rester jusqu'à la Libération. Elle fut cachée aux Mateaux, chez la famille Griats pendant plus d'un an et demi. (Jusqu'à 13 autres enfants auraient pu être cachés également à Méaudre à cette période)
Ce vendredi 13 juin 2014, nous étions donc réunis dans la salle des fêtes de Méaudre pour appréhender cette période en présence d'Agnès Buisson (Qui vient de publier un livre de souvenirs : Dessine-moi un wagon, Agnès Buisson, Le Manuscrit Edition, mai 2013) et de l'historien Olivier Vallade (Auteur notamment Des combats au Souvenir, Lieux de Résistance et de Mémoire, Isère et Vercors, 1997, PUF) mais sans le réalisateur du film, Paroles d'Etoile, grève de la SNCF oblige....
Pour Agnès Buisson, nous avons trop longtemps oubliés ces héros de l'ombre, ces "taiseux" comme elle a, à plusieurs reprises, qualifié ces personnes, modestes et humbles, qui ont pourtant, par leurs actes, fait de la Résistance. Cette forme de résistance non armée (Passeurs de la ligne de démarcation, faussaires pour les papiers d'identité, personnes en cachant d'autres au sein de leur propre foyer....) fit honneur à la France mais resta trop souvent dans l'ombre de grandes figures ou d'importantes actions..
Cette rencontre, en présence d'un très important public, comprenant les classes de CM2 de Méaudre et d'Autrans, a été aussi l'occasion pour Agnès Buisson de scander trois mots : "Plus jamais ça", propos repris à plusieurs reprises par les enfants. (Petite piqure, pour l'auteur de ces lignes, de rappel dans une région ou le FN est arrivé largement en tête aux dernières élections européennes avec près de 30% des suffrages, ce que je tiens à souligner)
Agnès Buisson a également souligné que ce sont des policiers français qui ont procédés aux arrestations en juillet 1942 dans la capitale (On peut se référer ici au film La Rafle), odieux acte de collaboration, issu des accords entre Heydrich et Bousquet, secrétaire au maintien de l'ordre de Vichy. Son père d'ailleurs, raflé, conduit dans un camp d'internement, sera ensuite déporté dans un camp d'extermination, Auschwitz, ou il succombera rapidement, dès octobre 1942.
Après ce témoignage, nous avons pu assister à la projection du film Paroles d'Etoiles, et une sourde honte s'empare de nous à l'évocation des mesures antisémites prises par Vichy...Certains sont assignés dans un premier temps à résidence. D'autres s'échappent par miracle au moment des arrestations et se trouvent séparés de leur famille (Famille dont ils espéreront le retour à la Libération tout comme certaines familles de résistants du Vercors dont certains membres avaient été arrêtés durant l'été 1944...)Et puis, pour beaucoup, c'est d'abord les camps d'internement en France, Pithiviers, Beaune la Rollande, Drancy...
Témoignages émouvants, gorges serrées dans l'assistance, sentiments mélés de honte et de colère...Plus jamais ça.
75 000 juifs ont été envoyés dans les camps d'extermination...à l'est, dont 12 000 enfants. Moins de 2500 reviendront de l'enfer, dans un état moral et physique que l'on a peine à décrire.
C'est devant une salle totalement comble qu'Agnès Buisson, enfant caché à Méaudre lors de la seconde guerre mondiale, est venue échanger avec le public, présentant son histoire et celle de sa famille.
Un des témoins, revenant sur un lieu de mémoire. Extrait du film Paroles d'Etoiles
Après la projection du film, un échange a été réalisé entre le public d'un côté, Agnès Busson et Olivier Vallade de l'autre. Les scolaires de Méaudre ont posé de nombreuses questions aux deux intervenants.
Un film réalisé dans la classe des CM1-CM2 de Méaudre a également été projeté reprenant ainsi quelques questions posées auparavant par l'assistance.
Qu'est qu'un juste, un juif? Beaucoup de questions concernant également la vie et les sentiments de Mme Buisson durant cette période.
Des intervenants dans la salle, enfants ou adolescents au moment de la guerre ont également livrés leurs souvenirs : L'arrivée des allemands dans le village à partir du 21/07/1944, les autres familles juives cachées comme celle de Simon Nora (Membre du groupe de Jean Prevost après la dispersion du maquis le 23/07, il le quitta, ce qui lui sauva la vie, pour rejoindre sa famille à Méaudre alors que le reste du groupe tentait de quitter le Vercors. Ils furent tués au Pont Charvet, commune de Sassenage le 1/08/1944)
Témoignages d'anciens habitants du village, souvent adolescents ou enfants au moment des évènements et qui se souviennent également d'autres enfants ou familles cachés dans le village de Méaudre pendant la guerre.
10:45 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vercors, résistance, ffi, de gaulle, résistants, maquisards, maquis
Les commentaires sont fermés.