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27/12/2009

Tchétchénie an III

1585715047pd.jpgC'est à une vraie rafale de chiffres plus terrifiants les uns que les autres que nous expose le journal Le Monde ce matin pour illustrer deux articles publiés dans son édition de dimanche. Ils sont le funeste résultat de milliers de tirs d'armes automatiques Uzi, de bombes larguées par des chasseurs F-16 achetés au grand frère américain ou d'obus de chars Merkava.

Le « quotidien de référence » revenait bien sûr sur l'opération israélienne « Plomb durci », menée dans la bande de Gaza pendant 23 jours, entre le 27 décembre 2008 et  le 18 janvier 2009. Outre le nombre douloureusement élevé de victimes civiles palestiniennes tuées ou blessées (Sur les 1393 personnes tuées dénombrées, 347 étaient des enfants) dans des conditions barbares, le journal listait les dommages causés aux infrastructures : 18 écoles détruites, 3500 habitations rasées, 56 000 autres endommagés, 700 ateliers ou entreprises détruits ou endommagés, 30 km de canalisation, 17% des terres cultivés et 20 des 29 usines produisant du béton détruits réduits en bouillie.

L'organisation Human Rights Watch a accusé Israël de crimes de guerre commis dans la bande de Gaza. Outre le meurtre de centaines de civils, l'armée israélienne est également accusée d'avoir utilisé des boucliers humains palestiniens dans ses opérations, d'avoir détruit des habitations sans aucun intérêt militaire....

Les dégâts sont estimés entre 700 et 900 millions de dollars mais l'aide promise ne peut arriver à cause du bouclage du territoire imposé par les autorités israéliennes. Les points de passage avec l'Egypte ou Israël sont fermés et seules quelques marchandises sont autorisées à rentrer dans le petit territoire selon la bonne/mauvaise volonté de Tel-Aviv. Ce goutte à goutte est loin d'être suffisant pour une population dont 80% vit sous le seul de pauvreté et dépend en immense partie de l'aide humanitaire internationale.

Demain doit se dérouler à Rafah, ville palestinienne frontalière de l'Egypte, une marche internationale pour la liberté de Gaza, interdite par le Caire à l'occasion du premier anniversaire de l'offensive israélienne contre le territoire palestinien. Une manière de rappeler nos dirigeants à leurs responsabilités en agissant autrement que par des communiqués larmoyants peu contraignants. Car tant que cette situation perdurera dans les territoires palestiniens, le fossé ne cessera de croître entre le monde occidental et le monde arabo-musulman. Cette situation sert de catalyseur pour de nombreuses mouvances à tendance terroriste.

Mais il y a un aspect positif à cela, le seul peut être, c'est la précision des chiffres. Le moindre blessé, la moindre destruction est comptabilisée, notée, recensée...Cela s'explique par la qualité d'une presse israélienne libre et parfois extrêmement critique face au pouvoir en place, une société civile très impliquée avec des associations de défense des droits de l'homme comme la Paix Maintenant, une exposition médiatique unique dans le monde en termes de nombre de médias présents sur le terrain pour couvrir les différentes évolutions du conflit. (Même si durant ce conflit, rares ont été les reporters qui ont pu faire leur métier face au black out decrété par Israël)

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Rien de tel, dans une petite République membre de la Fédération de Russie, à savoir la frondeuse Tchétchénie, placée depuis trois ans sous la coupe d'un homme, Ramzan Kadyrov. C'est l'auteur du phénoménal ouvrage Les Bienveillantes, Jonathan Littell, romancier mais également ancien de l'action humanitaire dans ce petit territoire qui nous y emmène à travers un nouveau livre intitulé Tchétchénie an III. Et là bas, la réalité, est trop souvent méconnue en Occident. Pour estimer le nombre de morts, les défenseurs des droits de l'homme en sont réduits à extrapoler en fonction des rares témoignages recueillis.

L'auteur avoue avoir réécrit une partie de son livre après l'assassinat en juillet dernier de Natalia Estemirova, figure de proue des défenseurs des droits de l'homme dans ce qu'il faut bien qualifier de zone de non droit, ou la vie et la mort ne semble dépendre que du desiderata d'une seule personne, à savoir son président Ramzan Kaydrov. Ce dernier, chef de clan est le symbole même de la politique dite de tchétchénisation mise en place par Vladimir Poutine dans ce petit territoire afin que la sale boulôt soit désormais effectué par des milices locales et non par des troupes fédérales.

Méconnu, complexe, faisant intervenir de multiples acteurs, cette zone qui englobe tout le Caucase Nord fait rarement la une des actualités occidentales. Seuls des évènements sanglants comme la prise d'otages de Beslan en 2004 ou les assassinats de figures locales font exception à la règle.

A Groznyï (Ce qui signifie Terrible en russe), tout a été reconstruit tel un immense village de Potemkine donnant ainsi une parfaite illusion de normalité. Pourtant les assassinats, enlèvements, viols continuent sans que l'on puisse les dénombrer. Assassiner les rares figures qui se battent pour la justice et la vérité constitue la meilleure arme pour empêcher toute recherche et toute enquête.

Pour en savoir plus sur la Tchéchénie, le livre d'Hélène Blanc (Auteur notamment de KGB Connexion) intitulé T comme Tchétchénie, reste pour moi la référence. A lire également les différentes ouvrages de la journaliste russe assassinée, le jour de l'anniversaire de Vladimir Poutine, Anna Politkovskaïa (Voyage en enfer, Le Déshonneur russe ou La Russie selon Poutine), le livre du Comité Tchétchénie intitulé tout simplement Tchétchnie, dix clefs pour comprendre, Tchétchénie,une affaire intérieure? dans la collection autrement. A lire également le témoignage du docteur Khassan Baiev, Le Serment tchétchène. Enfin le meilleur livre pour comprendre la politique russe et son tsar actuel, Vladimir Poutine reste le libre de Jean Michel Le Carré.